Le 17 février dernier se sont ouvertes les négociations AGIRC ARRCO entre les organisations patronales et syndicales qui concernent 18 millions de cotisants et 12 millions de retraités et qui représentent 30 à 56 % du montant total de la pension.
La situation financière de ces régimes n’est contestée par personne.
Les réserves de l’AGIRC arriveront à épuisement en 2018, celles de l’ARRCO en 2027.
Il fallait donc apporter des réponses pour maintenir les droits des salariés, assurer un niveau de retraite permettant de vivre dignement et pérenniser les régimes sur le long terme.
La CGT a fait des propositions immédiates et chiffrées dès le début de la négociation, permettant de dégager de nouvelles ressources pour maintenir les droits à travers, notamment, de deux propositions phares :
Une augmentation de la cotisation AGIRC pour financer le régime qui en a le plus besoin, ce qui représente 7 euros par mois pour un salaire de 4 000 euros bruts et un apport de 2 milliards d’euros dès 2016 ;
Une contribution transitoire versée par les entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale femme/homme et dégressive en fonction des efforts réalisés.
Apport de 5,7 milliards d’euros dès 2016.
Le 16 octobre, la négociation s’est terminée par un accord de principe avec effet dès 2019, soumis à signature qui concernera tous les salariés relevant du privé nés en 1957 et suivant.
L’accord qui devrait être signé par les trois organisations patronales et la CFDT, la CFE CGC et la CFTC le 30 octobre prochain, c’est le report de l’âge de départ en retraite d’un an ou une baisse des pensions.
La CGT souhaite éclairer l’ensemble des salariés, retraités et demandeurs d’emploi sur le report de l’âge de départ en retraite et la baisse du niveau des pensions.
L’accord prévoit un système de bonus-malus pour les salariés, selon l’âge auxquels ils partiront en retraite.
Un salarié qui aurait toutes ses années pour prétendre faire valoir ses droits à retraite dans le régime de base, aura alors plusieurs choix au niveau de sa retraite complémentaire : prenons quelques exemples (voir exemples ci-dessous).
Premier exemple
le salarié a 62 ans, il a toutes ses années pour prétendre bénéficier d’une retraite à taux plein.
Il peut partir en retraite mais, avec cet accord, il se verra amputer sa retraite complémentaire de 10 % pendant trois ans ;
pour l’éviter, Il décide de retarder son départ, dans ce cas :
il n’a plus d’abattement s’il part à 63 ans,
il bénéficie d’un bonus de 10 % pendant un an, s’il part à 64 ans,
il bénéficie d’un bonus de 20 % pendant un an, s’il part à 65 ans,
il bénéficie d’un bonus de 30 % pendant un an, s’il part à 66 ans.
Deuxième exemple
une femme a son taux plein à 64 ans, ce qui est la moyenne aujourd’hui au regard des carrières des femmes.
Elle décide de bénéficier de ses droits à retraite à 64 ans, elle aura une retraite complémentaire amputée de 10 % pendant trois ans ;
si elle décide de reporter son départ, dans ce cas :
elle n’aura plus d’abattement à 65 ans,
elle bénéficiera d’un bonus de 10 % pendant un an, si elle part à 66 ans ,
elle bénéficiera d’un bonus de 20 % pendant un an, si elle part à 67 ans,
elle bénéficiera d’un bonus de 30 % pendant un an, si elle part à 68 ans.
Troisième exemple
Un salarié bénéficie du dispositif carrière longue ou pénibilité qui lui permet de partir à 60 ans :
il se verra amputer sa retraite complémentaire de 10 % pendant trois ans ;
s’il décide de reculer l’âge de départ, dans ce cas :
il n’a plus d’abattement s’il part à 61 ans,
il bénéficie d’un bonus de 10 % pendant un an, s’il part à 62 ans,
il bénéficie d’un bonus de 20 % pendant un an, s’il part à 63 ans,
il bénéficie d’un bonus de 30 % pendant un an, s’il part à 64 an.
Tous les salariés relevant du secteur privé, quelle que-soit leur situation au regard des droits à la retraite se verront concernés par cet accord.
Eu égard au pouvoir d’achat des salariés et des retraités, nombre de salariés n’aura pas d’autre choix que de travailler plus longtemps.
Il s’agit donc d’un report de l’âge de départ en retraite.
Pour d’autres, notamment pour les 6 millions de demandeurs d’emploi qui n’ont pas d’autre choix que de partir en retraite à l’âge du taux plein, ils se verront appliquer ces abattements de 10 % pendant trois ans.
Il en est de même pour toutes celles et tous ceux qui sont en maladie voire en longue maladie.
Pour tous ceux-là, ce sera une baisse imposée du niveau de leur retraite.
Nous rappelons que le niveau moyen de retraite, (base + complémentaire), est de 1.206 euros et que nombre d’entre les retraités sont bien en dessous.
Seuls ceux qui ne sont pas assujetti à la CSG à la retraite seront épargnés par cet accord.
Le gel de la revalorisation des pensions
Une revalorisation des pensions à hauteur des prix - 1 % avec une clause « plancher ».
Cela signifie que si l’inflation, comme le prévoient nombre d’économistes reste faible dans les trois prochaines années, ce sera un gel du niveau des pensions.
Celui-ci est déjà en œuvre depuis 2013, date du dernier accord sur les retraites complémentaires ;
un décalage de la date de revalorisation des pensions, de façon pérenne, au 1er novembre
La baisse du rendement des régimes de retraite
Une augmentation du prix d’achat du point, en terme technique, c’est une baisse du rendement des régimes qui touchera tous les retraités futurs.
Pour le même salaire, il achètera moins de points donc sa retraite chutera.
La fin du régime AGIRC par la création d’un régime unifié issu de la fusion de l’AGIRC et de l’ARRCO
La disparition de l’AGIRC en fusionnant l’AGIRC et l’ARRCO a été troquée contre une négociation nationale interprofessionnelle pour définir les grandes lignes de la notion d’encadrement.
Rien ne garantit l’avenir du statut cadre, de la GMP (garantie minimale du point), des 1,5 % de prévoyance et du futur niveau de pensions complémentaires des cadres.
Aucun financement supplémentaire du patronat
En contrepartie, le Medef propose de mettre 300 millions de cotisations sur la table.
Cette augmentation sera compensée par une baisse des cotisations ATMP (accident du travail, maladie professionnelle), c’est l’engagement qu’a pris le gouvernement pour que cet accord puisse exister.
C’est scandaleux !
Le patronat se paye sur l’argent des victimes du mal-travail organisé par lui-même alors que les sous déclarations sont largement reconnues.
La CGT a refusé ce marché de dupe qui va permettre, dans un deuxième temps, au pouvoir politique, de reporter l’âge légal de départ en retraite.
Ces mesures très douloureuses pour les salariés et les retraités ne suffiront même pas à financer le déficit (6 milliards alors que le besoin est de 8,7 milliards en 2020).
Sans rapport de force d’ici là, la prochaine négociation en 2019 devra donc encore à priori se traduire par de nouvelles amputations de droits pour les salariés.
Il ne reste plus que quelques jours pour démontrer aux salariés la nocivité de cet accord de principe.